Ras-le-bol de cette grossophobie médicale
Bonjour, je m’appelle Sandrine. Aujourd’hui je souhaite témoigner en anonyme car je ne veux pas avoir de problème dans mon travail ou ailleurs. Je suis début 30 aine et je suis infirmière. Malheureusement, je souffre de boulimie et plus particulièrement d’hyperphagie depuis ses dernières années. Cette maladie est sans fin et me gâche la vie.J’ai un petit garçon qui me demande aussi beaucoup de temps même si mon mari est présent. Je suis triste de dire ca mais j’ai eu de très mauvaises expérience avec des médecins généralistes, psychiatres, médecin nutritionniste… J’ai l’impression de faire une liste et encore il manque des professionnels. J’ai tellement eu de propos déplacés … Mais même déjà une reflexion, c’est une réflexion de trop. Et tout ces échanges m’ont profondément blessé ! En travaillant dans le milieu hospitalier je sais qu’il y a beaucoup de grossophobie et autres problématiques que je trouve grave et que j’essayais de mettre de côté car je suis d’un naturel optimiste et positif. Passer de l’autre côté de la barrière (patiente) était déjà compliqué mais recevoir en pleine figure ce genre de propos grossophobes et de reflexions sans gène m’a littéralement brisé. En France, nous les gros ( je n’ai plus peur de mettre de mot dessus ), nous sommes des pestiférés. Nous sommes vus comme des bêtes de foire et je commence à en avoir ras le bol. Du jugement de la part des personnes qui ne travaillent pas dans le milieu médical c’est déjà vraiment moyen et blessant ( mais je me dit qu’elles ne comprennent pas car elles n’ont pas les connaissances . Je dois avouer que j’essaie de me réconforter comme je peux ). Mais venant de la part de professionnels médicaux ca me met vraiment en colère et hors de moi. Une de ses réflexions a été: “ maIheureusement l’obésité c’est la maladie du siècle “. Oui merci et qu’est ce que je fais de cette information ? Il m’avait clairement dit de manger plus de fruits et de légumes et de faire du sport. Et il avait ajouté : “ enfin vous êtes infirmière, vous devriez connaitre tout ça “. Il m’avait sorti tout son savoir sans me poser de questions sur mes habitudes alimentaires , mon rythme de vie, sans vraiment s’intéresser à moi…Et dans son regard je ressentais un peu de blame, de jugement. Comme si j’étais grosse parce que je suis faible et que je m’empiffre. A ce rendez-vous je me suis vraiment sentie mal et je ne savais plus ou me placer. Je disais bêtement dit oui. Je me souviens que quand je suis sortie du cabinet j’ai couru vers ma voiture pour m’y enfermer et pleurer. Ce fut un réel choc pour moi. Bien entendu je n’y suis plus retournée. Quelques jours après, après avoir repris mes esprits, j’ai pris rendez-vous avec une femme cette fois ci et une autre médecin généraliste à côté de ma ville. Une femme dans la 50aine, très fine, très énergique, très souriante… Quand j’ai vu son physique, je me suis dit que j’allais me prendre une autre claque en plein visage et que j’allais encore être jugée. J’ai eu de la chance, la consultation s’est bien passée. A la suite de ça, j’ai essayé de trouver un psychiatre et un médecin nutritionniste , disponibles qui pouvaient me convenir. Après 2 mois d’attente je me souviens que j’avais enfin réussi à voir le psychiatre. Le premier rendez-vous s’est passé normalement. Et là au deuxième rendez-vous, ce fut encore la déception. En plus des anti dépresseurs il m’a carrément conseillé de prendre des brûleurs de graisse et pilules pour maigrir. Et ce à peine au bout de 30 minutes OH MY GOD !!! Je suis restée scotchée sur ma chaise et j’étais tellement désemparée par ce qu’il m’a dit que je n’ai pas réussi à réagir. Et puis à la fin de la consultation j’ai eu le droit à cette fameuse tirade : pensez à manger correctement, à éliminer les grignotages ….Comme si mes TCA étaient aussi simple que ça. Encore un médecin qui ne me comprenait pas, qui me jugeait et qui ne connaissait pas l’hyperphagie. Dernier exemple, c’était avec une médecin nutritionniste. Celle-ci m’a tellement infantilisé durant la séance que je me souviens avoir eu un fou rire nerveux. Au début elle m’a demandé de me peser et là un “ AH OUII “ était sorti de se bouche. Le genre de” ah oui c’est quand même lourd là ”. Après ça elle a passé la consultation à m’expliquer comment manger, comme si le problème venait du fait que je ne comprenait pas les bases de l’alimentation. Elle ne m’a pas proposé de peser les aliments mais elle souhaitait que je mange tant de protéines, glucides … à chaque repas ( en mesurant les portions à l’aide de la paume de ma main). Je n’avais pas réussi à en placer une, comme si je n’étais pas légitime de parler.Elle aura totalement mis de côté mes TCA et pour elle mon poids dépendait simplement de ma mauvaise gestion des repas. Avec du recul ce que je raconte me parait lunaire. J’ai vraiment sentie que je n’étais pas écoutée et considérée. Ces professionnels pensaient mieux savoir que moi ce dont j’avais besoin. Je me suis vraiment sentie seule avec mes TCA. J’étais grosse, c’était de ma faute, il fallait simplement que je fasse plus d’effort. Si c’était aussi simple que ca … Heureusement aujourd’hui je suis bien entourée. Je dois admettre que j’ai beaucoup plus de mal à travailler à l’hôpital car mes mésaventures m’ont plongées dans une autre dimension et maintenant je n’arrive plus à tolérer les propos que mes collègues … ont envers les patients et les autres professionnels à l’hôpital. Je vois qu’il y a de plus en plus de mouvements sur internet à propos du body positive, le non jugement, normaliser tous les corps … et j’espère que ca va vraiment rentrer dans les mentalités de chacun. Si vous vous reconnaissez, ne baissez pas les bras. Heureusement il y a aussi de bons professionnels. Ça m’aura pris du temps pour les trouver mais c’est chose faite. Ne vous découragez pas vous finirez bien par tomber sur un professionnel qui vous écoutera et vous comprendra.