Témoignage TCA : Alix - 20 ans
Témoignage TCA : ARTICLE RÉDIGÉ par Alix Fortin, patiente.
Effectivement, personne ne m’a jamais forcée à lâcher ma fourchette à la table du dîner, refusant de tout avaler. Personne ne m’a jamais forcée à marcher 25km par jour alors que mes articulations me criaient d’arrêter. Personne ne m’a non plus forcée à avaler une quantité invraisemblable de nourriture sans même prendre la peine de respirer. Ces séances d’abdominaux, ces marches sans fin mais remplies de faim, ces vols dans les placards, ces achats secrets, ces aliments mâchés puis recrachés..: toutes ces décisions, oui, c’est moi-même qui les ai prises, et pour certaines personnes, c’est comme si j’avais créé mon propre trouble du comportement alimentaire.
Mais non, je ne l’ai pas choisi ni souhaité, de la même façon qu’on ne choisit pas d’avoir un cancer ou de l’asthme.
Les troubles du comportement alimentaire sont des maladies mentales, et chaque choix que je prends sous l’influence de ces troubles ne sont pas les miens, mais ceux de la petite voix, celle qui me souffle à l’oreille que ce n’est jamais assez, et qu’il faut toujours plus. Personne va, volontairement, vivre sous le dictat de ces troubles qui sont aujourd’hui si tenaces et tellement pervers. Personne ne souhaite rater une partie de sa vie en se rétrécissant, en s’amaigrissant, en disparaissant. Personne ne souhaite passer une période obnubilé par des chiffres, partout, toujours : balance, poids (gagné, perdu), imc, calories, km. Personne ne souhaite non plus vivre sa vie sur le bord, les deux pieds à côté et, si on a de la chance, un pied dedans et un pied à l’extérieur. Personne.
Les troubles alimentaires n’ont jamais été de la faute du malade. Non seulement il n’invente rien, mais il n’est pas normal de penser à la nourriture tout le temps, ni de se priver d’un des besoins humains les plus fondamentaux : la nourriture.
L’anorexie et la boulimie - et tant d’autres troubles - sont des maladies mentales trop peu reconnues et si mal comprise. Il ne s’agit pas de manger davantage ou de faire quelconque effort, ces pathologies touchent ici des choses bien plus profondes. Invisibles, inconnues, et pourtant si importantes.