Témoignage TCA Samara : je suis Samara, je suis une élève et non la fille malade - PARTIE 2/2

Témoignage TCA Samara : je suis Samara, je suis une élève et non la fille malade - PARTIE 2/2

Témoignage TCA Samara : je suis Samara, je suis une élève et non la fille malade - PARTIE 2/2

 

Moi qui pensais sortir vite, j'ai passé 6 mois en pédiatrie, qui ont été extrêmement compliqués. Mon état s'est extrêmement dégradé, m'amenant à avoir une place réservée en réanimation. Mon cœur, mon foie, mes muscles, les os, mon corps souffraient énormément... Je suis alors transférée dans un centre plus spécialisé en novembre. Malheureusement il aura fallu attendre que je tombe bien bas pour être prise en charge. J'ai entendu tant de fois "vous êtes hors secteur" (la où j'habite il n'y a rien pour les tca...) ou encore "votre imc n'est pas assez faible" … C’est vraiment injuste, car ce n'est pas le poids qu’on fait qui définit si on a plus besoin d'aide ou non. C’est totalement faux ! À Brest, je suis restée 7 mois. 7 longs mois très durs... J'étais seule, coupée de ma famille pendant un long moment.                                        

 

J'étais livrée à moi même et avec du recul, c'est aussi ce qui m'a fait énormément avancer mentalement, et apporté beaucoup de maturité. Ce transfert était pour moi une chance de m’en sortir, que j’allais saisir et j’en était décidée! Je me suis battue chaque seconde, je me suis battue à chaque plateau pour recommencer à manger, puis ajouter une cuillère, puis 2, puis 3... J’ai repris du poids, ce qui m’a permis, d’alléger toutes les restrictions, de récupérer des affaires (je n’avais plus qu’une feuille et un crayon), de pouvoir appeler ma famille, de sortir respirer l’air dehors ( d’ailleurs, je sais maintenant tellement apprécier ces petits moments, pouvoir sortir quand on veut respirer l’air, avoir ses affaires à disposition etc..)  Désormais j’avais le droit à une visite tous les dimanches. Et chaque dimanche, je me souviens que je choisissais soigneusement mes petits vêtements. Je me maquillais un peu ... j’étais tellement heureuse! C’était mon jour ! Et, bientôt chaque dimanche, j’avais décidé de faire des goûters défis car mes parents venaient vers le goûter. Et donc, je leur avais demandé d’apporter des nouvelles choses. Je recommençais à me faire plaisir après tellement de longs mois.                                                                                        

 

Même si ce n’était qu’à cet instant du dimanche, je rendais mes parents heureux, et ça, ça n’avait pas de prix... Et puis le confinement est arrivé. C'était pas rigolo du tout. Déjà je n'ai pas pu voir ma famille durant plus de 2mois...heureusement j'avais le droit à un appel Skype une fois par semaine....! Concernant le quotidien, au début on devait rester toute la journée dans nos chambre (je précise qu'il n'y a pas de télé, et on a pas beaucoup d'affaires...!!) . Plus le droit de se regrouper pour parler avec d'autres jeunes … Nos repas se faisaient désormais seul en chambre (contre en commun avant) et en fait ça m’a beaucoup aidé… En effet, c’est à partir de ce moment que j’ai vraiment commencé à remanger. Les repas étaient attendus avec impatience, car c’était devenu une source d’occupation. Les fois où j’avais mes parents au téléphone, j’avais toujours à leur annoncer que j’avais vaincu une peur, remangé de nouvelles choses, ou augmenté mes quantités. J’apercevais dans leur voix une joie immense de voir que je menais toutes ces petites victoires, et ça me remplissait de bonheur, ça m’encourageait de continuer encore, pour leur annoncer mes nouvelles victoires… Le confinement a été aussi tellement dur, que ça m’a encore plus fait prendre conscience que je serais tellement mieux chez moi, auprès de ma famille qui me manquait temps... que la vie c’était dehors, et pas ici. Que c’était pas ça, une vie... Avec une fille que j’ai rencontré la bas, qui était devenue comme ma sœur, on se soutenait tellement et je ne sais pas ce que j’aurais fait sans elle...

 

Et puis, fin avril, mes efforts payèrent, puisqu’ après un peu plus de 11 mois, j’enlevai enfin, ce maudit tuyau de mon nez qui me nourrissait...qui m’avait sauvé mais pourtant que je haïssais. C’était vraiment une nouvelle étape pour moi, et je ne voulais pas m’arrêter là... J’ai réussi à ne pas trop faire chuter mon poids au retrait de la sonde. J’arrivais à manger tous mes plateaux, j’étais super déterminée. Après le confinement, une fille anorexique est arrivée... ça a été assez dur, car elle était très prise par la maladie.  Mais j’étais désormais en capacité de surmonter ça, et de pas me laisser replonger. Le truc c’est qu’elle arrêtait pas de se comparer à moi, me scrutait de haut en bas, pour voir qui était la plus maigre, me demandait mon poids, ma taille, jusqu'où j’étais descendue…! «on sera toujours dans notre parcours je pense, confronté à des personnes qui seront très maigres, ou qui auront tendance à nous tirer vers le bas. Malheureusement à un certain stade, quand on est encore trop pris par la maladie, on a du mal à « résister » mais une fois que l’on est un peu plus solide psychiquement, on peut arriver à prendre du recul par rapport à tout ça... »   Puis j’ai pu revoir mes parents en mai avec une première PERMISSION !! Mes parents avaient accroché des ballons partout, fait une affiche « bienvenue », mis une banderole...! C’était trop chouette! J’ai eu un peu de permission de 24h (ce qui était cours car j’avais 2h de route allé et 2h retour!). Puis, ça s’est étendu après. J’ai continué à avancer, à ne pas relâcher les efforts, et le 15juin, enfin, après 7mois, je sortais de Brest!  J’étais tellement heureuse, car ça avait été très dur là bas. Mais, ça m’avait sauvé. J’étais tellement heureuse, mais j’avais tellement peur… C’était dur aussi de ne plus être dans cet état dit « critique » car cette petite voix rêvait d’y retourner. C’était dur d’avoir cette impression d’être « moins importante » car je ne suscitais plus autant d’inquiétude aux yeux de mes proches et des médecins.  C’était dur d’accepter de voir son corps changer, car j’avais pris 13kg durant ces 7mois. C’était forcément plus dur, de choisir la voix de la guérison, mais...c’était celle que j’avais choisi, et je ne comptais pas la lâcher.

 

Après le 15 juin, je suis passé 2-3 semaines par une unité de pédopsychiatrie près de chez moi. Puis, je suis allée à 45 minutes de chez moi, en pédiatrie ou je passais la moitié de la semaine et l’autre chez moi. Je suis finalement sortie mi août définitivement de l’hôpital. Je rentrais enfin chez moi, je n’étais plus en permission, j’étais libre . Ahh, le bonheur d’être enfin chez soi, de poser ses valises, ranger mes petits produits dans les tiroirs... ??‍♀️tout ça après 15 mois… Rentrer à la maison, auprès de ma famille était un vrai bonheur. Cependant, depuis le 15 juin ou j’étais sortie de Brest, j’étais dans des unités pas du tout spécialisées, qui ne connaissaient rien à l’anorexie (ce que je ne leur reproche pas), mais la transition n’était pas si simple. On me demandait par exemple si je voulais manger, me disait « toi je te mets pas de féculents hein? Pas de sauce? » alors que c’était des étapes que j’avais réussi à passer ! Depuis le 15 juin donc, j’avais fait un peu marche arrière côté alimentation.  Dans plusieurs occasions, je me suis sentie contrainte de prouver mon identité de « malade », de rentrer dans le moule de l’anorexique qu’on « attendait » de moi. Je n’étais pas prête à quitter cette peau, que pourtant j’aime et j’haïs tant. Pas prête à me trouver avec le corps d’une jeune fille de mon âge. Pas prête à grandir, à laisser cette maladie que je m’étais donné tant de mal à avoir pour acquis. Pas prête, car je n’avais pas trouvé qui je suis...breff, pas prête à tourner la page ?… La peur m’a envahi, « quoi? Quitter l’anorexie? Mais sans ça, quel but dans la vie tu auras? Comment sera ta vie sans-ELLE- ? »

 

Depuis la sortie de l’hôpital, la petite voix fait plus écho dans ma tête. Je n’ai plus la sanction d’être réprimandée à chaque perte, même si la menace d’une hospitalisation me guette. Mes parents ont du tout gérer depuis ma sortie de Brest. Ce sont eux par exemple qui disaient dans l’unité qui m’a prise après, qu’il fallait me faire des pesées, qui a dû transmettre mes ordonnances de médicaments, et j’en passe!  J’ai été lâchée un peu trop vite, sans aucun suivi. Ce sont mes parents qui ont dû me prendre les rendez-vous, sans que personne ne les aiguille...je ne sais pas ce que j’aurais fait sans mes parents. Dans tout mon combat, c’est eux et mon frère qui m’ont accroché à la vie. 

 

Actuellement je suis suivie depuis peu chez •Médecin nutritionniste •pédopsychiatre •psychologue •psychomotricienne •EMDR •thérapie familiale (ça en fait pas mal!?) J’ai une énorme volonté de m’en sortir. Je me bats chaque jour, malgré les hauts et les bas.  Une chose est sûr, je ne lâcherai pas ?? . Mon combat c’est la prise de poids, qui reste encore très dure pour moi, mais je sais que ça arrivera. Je m’en veux souvent de ne pas y arriver, ça ne va pas assez vite, mais malheureusement l’anorexie est un long combat. Je suis rentrée en 2nd en septembre, et après un long moment de déscolarisation, ça fait un énorme bien!  Là bas, je suis Samara, je suis une élève et non la fille malade comme ça peut être le cas à l’hôpital...  C’est une motivation de plus, car actuellement j’ai un PAI c’est à dire que mon emploi du temps est aménagé. J’y vais par demi-journées. J’aimerais reprendre à temps plein. En plus, ça serait beaucoup mieux pour suivre les cours... Et puis, j’ai envie de pouvoir mieux réfléchir. Car bien que ce soit mieux qu’il y a un an, je n’ai encore pas récupéré toutes mes capacités d’avant … Voilà où j’en suis aujourd’hui...  

 

 

Vous pouvez retrouver la première partie du témoignage de Samara ici : Témoigane Samara - partie 1/2  

 

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