AMOUR & TCA

AMOUR & TCA

AMOUR & TCA

 

Être en couple en souffrant d'un trouble du comportement alimentaire.  

 

À notre époque contemporaine, une des préoccupations humaines, accaparante voire viscérale, est l'amour. En effet, même si le sujet n'est pas fondateur d'une existence, l'amour reste un synonyme de bonheur et de félicité.


Être en couple n'est pas un objectif de vie mais cela survient chez une majorité de personnes. Dès lors, le couple doit idéalement constituer une paire fusionnelle où la symbiose règne. Mais, la personne, au-delà de son amour pour l'autre et du partage de son quotidien, reste dans une unicité.

 

L'individu reste une personne et une personnalité avec des caractéristiques propres, notamment des goûts et des envies. Son passé, notamment, constitue l'individu. Il peut être en proie à certains maux, certaines peurs et angoisses qui sont dissociables du couple. Les troubles du comportement alimentaire en sont représentatifs et l'exemple parfait puisque dans les cas d'anorexie, de boulimie ou d'hyperphagie, on constate que les causes peuvent être dues à des traumatismes passés, une enfance tendue, une pression sociétale intense, une charge émotionnelle insoutenable etc.

 

 

TCA et relations amoureuses 

 

Les causes d'un trouble alimentaire sont multifactorielles mais celles-ci ont façonné la personne. Les TCA sont des maladies complexes et graves dont on peut guérir. Être dans le processus de guérion est un combat du quotidien. Le couple n'est pas une solution miracle à la restriction, aux mécanismes compensatoires ou aux ingurgitations massives de nourriture. Le couple est un plus, une source de joie qui n'est pas censée être une entrave dans la vie de l'autre, mais, les TCA ne sont pas forcement permissifs à cette idéologie.

 

Ces troubles ont des impacts directs sur les deux partenaires et dans tous les aspects du quotidien ; tout d'abord, le patient peut cacher son TCA à l'autre mais cela n'est pas durable car l'alimentation régit notre quotidien, l'autre se rendra vite compte d'un problème sous-jacent ; la sincérité étant tout de même un fondement de toute relation, la personne peut parler de son TCA à son/sa partenaire qui peut être directement heurté.e car l'alimentation est quand même intrinsèque à une relation, les repas peuvent être des moments de complicité.

 

Estelle Masson, dans son œuvre Manger, Français, Européens et Américains face à l’alimentation affirme : "les Français font preuve d’une étrange rigidité : ils mangent à heure fixe, veulent que les repas soient réglés comme papier à musique et passent toujours des heures à table". On comprend que les repas sont ritualisés dans notre pays, c'est un moment de partage, de discussion, de réunion et de création de liens profonds. Dans les TCA, la personne entretient une relation néfaste avec la nourriture et cela peut desservir une relation amoureuse. Dans le cas de l'anorexie il y a un refus de se nourrir, c'est se méfier de la nourriture et la rejeter. Pour la boulimie et l'hyperphagie il y a des compulsions alimentaires qui peuvent questionner le/la partenaire. Les phases de restriction peuvent aussi être curieuses pour lui/elle. Il/elle peut cogiter à outrance et trouver une certaine étrangeté chez l'autre. Les TCA sont tellement multiples et la manière de cope est personnelle, l'amoureux.se qui ne souffre pas de TCA peut être submergé.e et sans cesse dans la préoccupation, l'anticipation des repas pour son/sa partenaire. Évidemment, le bien-être de la personne souffrant de trouble alimentaire est nécessaire, l'acheminement vers la guérison est primordial mais il ne faut pas léser les partenaires qui se sentent impuissants face aux craintes, aux comportements "nocifs et préjudiciables" de leur bien-aimé.

 

En somme, les TCA et le couple peuvent être source de tensions, d'incompréhension et d'affronts. Le/la partenaire dit "sain" peut être agacé.e et frustré.e de voir une non-évolution chez l'autre, il/elle peut être malheureux.se et triste de ne pas partager de repas avec l'autre, de limiter ses sorties au restaurant, de ne pas trouver cette insouciance alimentaire chez l'autre.

 

Pour le partenaire, devoir gérer le trouble du comportement alimentaire de l'autre peut être pesant, même si celui-ci soutient profondément celui qui souffre, c'est un poids au quotidien. Le partenaire peut devenir est une éponge, il sera témoin de la souffrance, l'affliction, les doutes et la lutte de son partenaire. Son seul pouvoir sera de rassurer l'autre, de le comprendre mais il n'aura pas une mainmise directe sur le TCA, sur la guérison de la personne (seule la personne souffrant de TCA à la  mainmise directe sur son rétablissement. Par contre, l'entourage, les membres de la famille, le/la partenaire ont une réelle carte à jouter peut l'aider). Le/la partenaire peut aider et soulager, être témoin, mais il n'est pas le décisionnaire d'une guérison durable. Cela peut être source de frustration pour lui, surtout s'il ne comprend pas les TCA et leurs mécanismes, ce sujet étant invisibilisé, certains partenaires peuvent le discréditer et donc renforcer le trouble chez l'autre. La question de la vie intime et sexuelle peut aussi être abordée, les TCA sont souvent liés à l'image faussée de soi, la non-acceptation de soi et de son corps, ce qui peut avoir des conséquences malencontreuses dans la vie intime tant pour celui qui souffre que pour le partenaire (frustrations, peur, troubles érectiles etc.), un climat de confiance et rassurant est indispensable.

 

Des mécanismes toxiques et malsains peuvent se développer au sein du couple : les mensonges, les cachoteries et la déformation de la réalité. Cela provient surtout de la personne souffrant de TCA qui ressent de la honte, des remords et de la culpabilité quant à son trouble alimentaire. On remarque souvent que les crises de boulimie ou d'hyperphagie se font lorsque le partenaire est absent, la culpabilité et le sentiment de honte sont tellement puissants que la personne ressent le besoin de ne pas être vue. Son/sa partenaire qui partage sa vie doit rester dans l'ignorance et garder une image "lisse" de l'autre, sans aucun défaut ou défaillance alimentaire. Le patient peut penser que son TCA est une faiblesse, un trouble le décrédibilisant face à l'autre alors que c'est son combat.

 

Les personnes souffrant de TCA (trouble du comportement alimentaire) ne sont pas à blâmer - encore heureux ! - leur TCA est omniprésent et même si cette guérison est longue, elle est possible !!! 

 

Le partenaire doit alors être hypothétiquement et idéalement patient et compréhensif, un roc émotionnel et qui soutient l'autre sans faille. Mais cela n'est pas tout le temps possible à 100 %.  L'individu qui souffre de TCA doit prendre soin de sa santé. L'amour est un plus et il ne doit pas entraver une guérison, une paix intérieur et un bien-être alimentaire. En somme, il faut privilégier sa guérison, les TCA ne sont pas toujours compris et peuvent même créer des conflits (qui ne sont pas désirés) au sein du couple et cela résulte d'un manque de communication autour de ces problématiques contemporaines.

 

Le partenaire peut-être également un vrai levier. 

 

Malgré tout, BONNE NOUVELLE : toutes les relations ne sont pas similaires, chacun tolère ce qu'il peut tolérer et il n'y a aucun doute qu'un partenaire peut supporter la maladie et être "à l'aise" quant au TCA de la personne et ses frayeurs alimentaires. Il ne faut pas invisibiliser les relations où TCA et amour se conjuguent parfaitement, il y a des partenaires qui sont réellement bons pour l'autre. Un amour profond et sincère n'a pas de limites. Les TCA, même s'ils sont invasifs ne sont pas un frein à quelconque relation où l'autre est prêt et à même de fournir les efforts pour aider et accomapgner au mieux la personne dans son rétablissement ou dans le fait que le TCA ne s'aggrave pas. Une relation fusionnelle, de confiance où le partenaire veille et protège l'autre est possible, ce type de relation peut être bénéfique pour la personne souffrant d'un trouble alimentaire qui peut guérir progressivement, se sentant soutenue et épaulée.

 

Fort heureusement, une vie de couple avec une personne qui souffre de TCA est possible. Le/la partenaire doit garder son équilibre, et aussi garder sa position de partenaire et non de soignant. S'informer, échanger, être ouvert d'esprit, patient,  s'adapter, travailler sur ses propres problèmes, sur son bien être ... sont des choses que le/la partenaire peut faire pour lui/elle-même et pour soutenir le patient. Si la personne n'est pas prête à se mettre à nu (et ce,dans tous les sens du terme) ce n'est pas à cause de vous. Elle essaie simplement de combattre ses propres peurs et demons. Guérir prendre du temps. 

 

Rassurer sa/son partenaire, ne pas parler de poids, de physique, ne pas se comparer ou le/la comparer aux autres, ne pas la féliciter quand elle perd ou prend du poids ... sont autant de points à garder en tête. 

 

 

Il faut également savoir penser à soi, à son bonheur et à son bien-être. 

 

Un point que nous pouvons également soulever est le fait que les partenaires peuvent aussi à leur tour développer un TCA ou une problématique autour de l'alimentation. Le célèbre YouTubeur Nikocado Avocado est le parfait exemple. En couple depuis plusieurs années, Nikocado a développé des TCA qui se sont répercutés sur son compagnon. Sur leur chaîne YouTube, Nikocado fait des mukbangs et mange de la nourriture à foison. Dans chacune de ses vidéos, son partenaire apparaît régulièrement sur sa chaîne et l'on voit que celui-ci est souffre de TCA. Les deux s'insultent souvent devant la caméra et l'on comprend que leur consommation alimentaire, dans l'excès, en est en partie la cause...

 

Bref les relations humaines ne sont pas faciles. C'est une histoire d'équilibre, de curseur. Chose importante, il faut également penser à soi et à son bien-être. Ce n'est pas égoiste de penser à son épanouissement. D'ailleurs, comment pouvons-nous vraiment aider une personne, comme il se doit, en profondeur, si on a nous même cette problématique ? Au final cela coule de source.

 

Les TCA et l'amour peuvent donc être instable (comme pas du tout). Ce type de relation où les TCA sont puissants peut fonctionner comme être destructeur pour l'un comme pour l'autre. Cela n'est pas prévisible. Mais la guérison, consulter des professionnels (diététiciens, psychologues, psychiatres etc.) est nécessaire car avant de penser à deux, il faut penser à soi et à son bonheur, sa propre durabilité.

 

 

"Ce n'est pas égoïste de vivre pour soi-même, une personne qui n'a pas l'amour de soi ne peut donner de l'amour aux autres" - André Mathieu

 

 

Katérina Peralta

 

 

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